En quoi consiste un centenaire ?

De Renaud Payre- Professeur de science politique à l'IEP de Lyon, et Pierre Yves Saunier- Université Laval Département des Sciences Historiques
Il existe, aujourd’hui comme hier, de nombreux regroupements internationaux de municipalités dont UCLG est sans doute à l’heure actuelle le plus solide et le plus généraliste. Mais le foisonnement d’initiatives et d’activités singulières n’a pas cessé au cours des 100 dernières années.
Tout au long du 20ème siècle, les associations de municipalités se sont développées autour de thèmes très généraux, par exemple ceux de la paix ou de la construction européenne, mais aussi autour d’enjeux thématiques très spécialisés. Récemment, les associations ou réseaux de villes se sont ainsi multipliés sur des terrains aussi différents que les politiques éducatives, la défense de l’environnement ou l’éclairage urbain. Cela fait 100 ans que les municipalités de différents pays ont créé des regroupements et des associations pour systématiser leurs contacts, qui avaient bien évidemment commencé auparavant sous d’autres formes (correspondances, voyages d’étude, lectures), et qui continuent aujourd’hui à exister aussi sous d’autres formes. 100 ans que des groupements cherchent non seulement à défendre des intérêts urbains auprès des pouvoirs publics nationaux et internationaux, mais également à faire circuler des savoirs, des expériences, des idées, des procédés techniques et des politiques entre villes. 100 ans d’activités, de questions, de débats, d’organisation au sein de groupements ébauchés à la fin du 19eme siècle, mais qui ne prennent une tournure permanente qu’en 1913.
Il est impossible d’élaborer ici une typologie exhaustive des motivations dans les groupements intermunicipaux. Nous voulons donc simplement proposer un aperçu de la gamme de ces motivations autour de 3 remarques qui traitent de thèmes, de moments, de situations et de préoccupations différentes
- Il est frappant de voir l’importance donnée aux réseaux intermunicipaux dans des périodes de crise économique. C’est vrai pour l’entre-deux-guerres comme pour la période qui commence dans la décennie 1980. Très concrètement il s’agit de diversifier les activités, d’orienter la ville vers des activités de services et de lui confectionner une nouvelle image. Pour cela, il faut trouver des ressources financières que les gouvernements nationaux dirigés par les conservateurs n’accordent pas. Ce travail de confection d’une nouvelle image de la ville est entrepris précocement par les Chambres de commerce puis par les élus qui s’investissent à l’international, notamment au niveau européen.
- Dès les années 1910, certaines municipalités urbaines cherchent à contourner la pesanteur d’Etats unitaires et centralisés par une participation aux réseaux internationaux. Les unions de villes – avec leur lot de conférences, congrès et voyages d’études – offrent aux municipalités une expertise qu’elles n’ont pas eu le moyen de constituer tant leur administration est faible comparée à celle des Etats-nations. Face à leurs gouvernements nationaux, les associations municipales allemandes ou italiennes défendent leurs revendications en se basant sur la comparaison internationale que permet leur participation à une association internationale de municipalités.
- Lorsqu’on suit les activités internationales de villes particulières durant les 100 dernières années, on note parfois des périodes où l’implication dans les groupements internationaux est plus intense. Il s’avère qu’une équipe municipale réformatrice, un maire novice ou novateur, jouent parfois la carte internationale pour construire leur programme, justifier les changements qu’ils souhaitent introduire dans leur ville. Attention toutefois : la participation aux regroupements internationaux permet aussi de mobiliser les expériences étrangères pour légitimer le maintien d’une politique existante.
Sur ces motivations particulières à certains contextes, les recherches en cours sur les pratiques intermunicipales dans les villes d’Asie, d’Amérique du Sud ou d’Afrique soulignent des caractéristiques propres à ces villes et aux conditions urbaines de notre début de 21eme siècle. Mais ce sera l’affaire d’un autre centenaire.
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